À l’heure où l’Europe célèbre en comité fermé la capitulation de l’Allemagne et la fin de la Seconde Guerre Mondiale, il convient de parler du rôle, même indirect, qu’a joué une poignée d’aviateurs haïtiens dans la libération du monde libre contre les forces de l’Axe.
Il n’est pas nécessaire d’avoir un diplôme pour savoir que dans les périodes difficiles, on a souvent besoin d’un plus petit que nous pour s’en sortir, même si on les affuble de noms comme : ‘’babouins, nécros ou macaques’’. L’important, c’est d’avoir son aide au moment venu. L’illustration est venue au début des années 40. Une annonce publicitaire est apparue dans un journal haïtien de l’époque. Elle faisait état d’un recrutement de 40 pilotes pour l’entrainement à l’Institut de Tuskegee, en Alabama. Cette campagne était l’une des tentatives du Département de la Défense pour renforcer ses troupes décimées par l’attaque de Pearl Harbor du 7 décembre 1941.
C’est à la suite de cette annonce que des aviateurs haïtiens furent enrôlés au sein du programme de formation à la Base de Tuskegee, en Alabama.
Les trois premiers furent Raymond Cassagnol, Alix Pasquet et Philippe Célestin. Ils quittèrent Port-au-Prince en Février 1943 pour l’état d’Alabama, tristement connu pour avoir été un état ségrégationniste farouche, après des escales à Porto-Rico, Miami et Jacksonville.
Ensuite, ils ont dû subir le racisme en montant à bord des transports publics réservés qu’aux noirs. Cassagnol écrivit dans son autobiographie ‘’Mémoires d’un Révolutionnaire’’ qu’il évitait de sortir du camp d’entrainement de Tuskegee, parce qu’il ne voulait pas être traité ou se sentir inferieur, et subir l’humiliation qui venait avec. Ce fut un moment délicat pour ces trois hommes. Le journal le plus populaire au sein de la communauté noire et le plus répandu à l’époque L’Afro-American a même une publication sur ces trois aviateurs le 10 Avril 1943. On révéla que Pasquet et Célestin furent gradés dans leur pays à l’Ecole Militaire D’Haïti et étaient déjà des officiers, alors que Cassagnol travaillait comme mécanicien pour l’Armée de l’Air d’Haïti.
Malgré la férocité des combats dans la Méditerranée provoquant des pertes énormes, cela n’a pas allégé pour autant les conditions de recrutements des nouveaux aviateurs et opérateurs à la base. Célestin était un ‘’washout’’ un terme dont l’équivalent en français serait ‘’recalé’’ au centre d’entrainement de Tuskegee. Il avait pourtant réussi le premier stage et les test basique mais a échoué lors des phases secondaires. Peu de temps après, la graduation de Cassagnol, trois autres pilotes haïtiens furent recrutés : le Sergent Ludovic Audant et le Sergent Nicolas Pélissier et finalement Eberle Guilbaud.
Il est important de noter que les aviateurs de Tuskegee étaient les premiers pilotes afro-américains à être formés à Tuskegee lors de la Seconde Guerre Mondiale (1939-1945). Ils composaient la 332e Escadrille de Chasseur et le 447e Groupe de Bombardier de l’Armée de l’Air des Etats-Unis.
Une vingtaine d’années plus tard, Raymond Cassagnol fut honoré comme l’un des mitrailleurs issus de la base aérienne de Tuskegee, et des années plus tard, ses accomplissements furent reconnus par les Etats-unis comme pour Guilbaud et Pasquet. Le fils de Pasquet recevra sa récompense à titre posthume. Le plus important sera l’invitation de Raymond Cassagnol, le seul survivant parmi les aviateurs de Tuskegee à l’investiture de Barack Obama en Janvier 2009.
Comme quoi la reconnaissance est une lâcheté, dirait un ancien chef d’état…