Allo canal mortuaire! Nous compterons peut-être bientôt des cadavres par centaines ou par milliers

Temps de lecture : 2 minutes

Dernière mise à jour : 18 avril 2020 à 11h39

Dans la lettre XI des Lettres persanes, Montesquieu nous parle d’un bien singulier petit peuple : les Troglodytes, condamnés à périr de par leur bêtise et leur nature cupide. Ils ne purent faire front commun contre les fléaux de la nature et très vite, ils furent effacés de la surface de la terre.

Si l’au-delà diffusait ce qui se passe dans le monde des vivants, Montesquieu n’aurait qu’à brancher canal mortuaire et regarder les infos sur Haïti et le Covid-19 pour retrouver ses chers troglodytes.

Imaginez simplement la scène!

« Bonjour chers cadavres de l’au-delà, nous reprenons les infos qui font la une du monde des vivants et qui expliquent cette hausse soudaine de nos nouveaux locataires.

Aujourd’hui sur canal mortuaire, zoom sur Haïti pour parler de ce qui s’est passé récemment. 439 tests pour 43 cas positifs de covid-19. Alors que les chiffres de la pandémie avancent doucement vers l’horreur, l’exécutif se réjouit que les cadavres ne se comptent que sur les doigts d’une main. Qu’on s’entende même si seulement 3 cas sont officiellement présentés, rien ne nous garantit que d’autres décès, liés à la maladie, inconnus du gouvernement, n’aient pu survenir.

Ce 16 avril, nous apprenons la décision des gouvernants de ce pays de rouvrir les portes de leurs industries textiles. Non pas qu’on manque de place ici-bas dans l’au-delà, mais avouez que ce choix peut être remis en question.

Alors que des pays mieux préparés comme Cuba, France, Russie durcissent les mesures de confinement, Haïti semble avoir trouvé la formule pour pallier la propagation en coulisse. Pour ceux d’entre vous qui ont encore des liens avec des vivants qui habitent là-bas, nous vous rappelons qu’il n’y a pratiquement eu que très peu de changement depuis votre récent décès.

Les haïtiens continuent pour la plupart de se déplacer en tap-tap, moyen de transport très peu confortable, dans lequel les gens sont serrés les uns contre les autres comme des sardines. Ils sont toujours aussi réticents à se conformer aux mesures prises par leur gouvernement. Les hôpitaux manquent toujours de matériels et de personnels. Les médecins sont toujours des denrées rares.

Malgré tout, rouvrir les usines textiles semble être une décision arrêtée. Quand bien même seulement 30% de ces employés travailleront sur des périodes de roulement de 15 jours, des mesures n’ont pas été prises pour garantir leur santé avant ou après les heures de travail.

La grande question que l’on peut aussi poser est la suivante: si un employé tombe malade et dévoile des symptômes graves pendant qu’il est dans l’usine, des structures ont-elles été mises en place pour une prise en charge rapide ou du moins peut-on garantir sa sécurité? ( quand on sait que les funérailles d’une personne décédée du covid 19 sont très mal vues et que toute personne présentant ces symptômes en public fait l’objet d’une chasse à l’homme à la machette, ces questions deviennent pertinantes. )

En tout cas, les décisions hâtives ne sont pas en faveur de la population haïtienne et face à cette épidémie, on voit une gestion similaire au cholera: des décisions qui semblent ambiguës, et des actes qui font douter de la bonne foi des dirigeants.

C’etait canal mortuaire, restez à l’écoute, préparez les festivités pour nos nouveaux invités et surtout, passez une bonne éternité. »

David J. 

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