Retrouvons notre humanité

Temps de lecture : 2 minutes
Dernière mise à jour le 19 février 2019 à 6h27

Vous avez sans doute vu cette vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux. Elle a fait autant de buzz que le discours du chef de l’Etat durant ces derniers jours. Un jeune homme portant un mouchoir en guise de masque qui criait « Kakout pran bal ».

Je ne sais pas qui est Kakout. Je ne sais pas non plus qui est le jeune homme qui appelait à son secours. Je vois seulement dans la vidéo relayée un jeune homme qui s’est pris une balle à la cuisse.

J’ai seulement vu un être humain se vider de son sang alors que d’autres le soulevaient et tentaient de le sauver. J’ai vu encore un jeune qui risquait de perdre la vie faute de soins que nécessite son cas, dans un « pays locked« .

Pourtant, au lieu de fouetter la sensibilité de certains, cette scène n’a provoqué que l’hilarité. Montage de vidéo doublée de Beat synchronisé avec la voix de celui qui appelle au secours, tout en se filmant à coup d’invectives, des Mémés en photo, des affiches cinématographiques…Une grande créativité qui va à la vitesse de la lumière. Oui! Nous avons le rire facile. Nous dansons sur nos tombes, nous rions de nos malheurs. Si, au milieu de notre existence tragique, nous n’avons pas encore perdu notre joie de vivre et notre sens de l’humour, nous faisons un grand saut dans le vide de l’inhumanité. Pour le dire plus simplement, «nous avons perdu notre humanité». « Kakout pran bal » est devenu une plaisanterie de plus. Nous sommes constamment à l’affut de raillerie, comme pour fuir nos drames quotidiens. Maintenant, question à 1 million de dollars: depuis quand un être atteint de projectile était une blague? Je double la mise pour celui ou celle qui me décrira ses sentiments hypothétiquement si ce fameux Katout avait rendu l’âme.

Pourtant, dans une tentative de justification, on entend les commentaires et les questions du genre: »Sa l t ap regle kote l ye a »?, «Mesye a lèd», « Eske se pa t yon bandi »?

Les informations recueillies présentent Kakout comme un militant politique, membre de MOLEGHAF ( Mouvement de liberté, d’égalité des Haïtiens pour la fraternité ). Ce n’est pas tout. Son vrai nom est Ockname Raisin.

Et même si Kakout était un bandit? Ou un vulgaire inconnu? Doit-on réduire la valeur d’une vie humaine à ces genres d’enfantillage? Peut-on faire du malheur d’un jeune qui a foulé le macadam pour exprimer son ras-le-bol, un sujet de dérision? C’est dans la banalisation de la vie que naissent les plus grandes monstruosités.

Bon nombre de nos valeurs se sont déjà effritées. Mais de grâce, sauvons notre humanité! Ressaisissons-nous.

Vanessa Dalzon

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Mis à jour le 19 février 2019 à 6h27
Publié le 19 février 2019 à 6h27

À propos Vanessa Dalzon

Vanessa Dalzon est Rédactrice en chef à Balistrad, diplômée en Droit à l'Université Quisqueya (UniQ). Elle est l'auteure du roman « Opération-Rupture », chronique publiée dans Balistrad pendant 22 semaines. Vanessa Dalzon partage son temps en dehors du bureau entre l’écriture, la lecture, le chant et les séries télé.
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