Les véritables victimes du « peyi lock »

Temps de lecture : 2 minutes

Dernière mise à jour : 3 octobre 2019 à 12h50

Nous sommes à notre énième saison de « peyi lock« . Ce qu’il en est ? Nous le savons déjà : Paralysie totale et partout. De nombreuses personnes sont déjà victimes des casses et autres protestations en tout genre. Cependant, les véritables victimes de cette situation ne sont pas ceux qui ont perdu une vitre ou encore leur « business ». Il y a ceux qui n’ont rien qui pourtant n’arrêtent pas de perdre.

Manise est mère de quatre enfants et habite en plaine. Durant les deux premières semaines du « peyi lock », elle avait encore chez elle une marmite de riz qui leur a permis de tenir: « Nou bouyi diri a konsa chak jou pou nou pa mouri epi nou bwè dlo dèyè l ». Pour Manise, si une nouvelle semaine se déroulait de la même manière, sa famille n’aurait plus rien à manger.

Manise n’est pas la seule à subir ainsi le poids du « peyi lock ». De nombreuses familles doivent leur survie grâce au commerce quotidien de l’un des leurs. C’est le cas notamment des petits détaillants dont les revenus de la vente de la journée sont destinés à la cuisson.

Une autre catégorie de victimes est constituée de malades en tout genre et également des femmes enceintes. En plus des hôpitaux qui ferment de plus en plus leurs portes, les barricades qui sont dressées çà et là dans les villes calment la velléité même des plus téméraires qui voudraient les traverser ou encore de les enlever. Il importe peu que vous vouliez sauver un malade ou une femme enceinte sur le point d’accoucher. Le temps est aux revendications ! Votre état, aussi critique soit-il, ne peut attendrir les militants qui clament haut et fort qu’ils se battent pour de meilleures conditions de vie de la population.

De quelle population parle-t-on quand celle-ci ne peut aller chercher le pain quotidien sans se faire rançonner par ses « protecteurs autoproclamés » ? En effet, dans certaines zones- Bon-repos, Croix-des-Missions, Lilavois-, le droit de passage se paie et au prix fort. Au-delà des frais réclamés, les maigres achats sont aussi partagés par les « chefs » de la bande. Ces pauvres pères et mères de famille, après s’être cassés la tête pour trouver de quoi nourrir leur famille se font déposséder par ceux qui croient être les porteurs légitimes de leurs revendications.

Au fait, que sont-elles ces revendications ? Peut-on estimer se battre pour une population lorsqu’on la prive même de sa survie qu’elle a gagnée grâce à son dur labeur ? Au-delà de toute cette bataille, le peuple qui porte la charge de tous les mouvements et rassemblements en sortira-t-il gagnant Malheureusement, chaque partie-opposition et gouvernement- campe sur ses positions alors qu’encore une fois, ceux qui sont véritablement dans le besoin croupissent dans la misère et dans la crasse. Pendant que les soi-disant autorités se perdent en discussions futiles, les véritables victimes du « peyi lock » continuent d’espérer qu’un jour la roue finirait par tourner en leur faveur.

Vanessa Dalzon

*Manise est un nom d’emprunt.

À propos Vanessa Dalzon

Vanessa Dalzon est Rédactrice en chef à Balistrad, diplômée en Droit à l'Université Quisqueya (UniQ). Elle est l'auteure du roman « Opération-Rupture », chronique publiée dans Balistrad pendant 22 semaines. Vanessa Dalzon partage son temps en dehors du bureau entre l’écriture, la lecture, le chant et les séries télé.
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